The Hobbit
Peter Jackson, 2012
Ce qui frappe avant tout, c'est que le film rate complètement l'évolution de son personnage éponyme. Jackson nous impose les changements d'attitude de bilbo sans éléments « fondateurs » forts: sans qu'on comprenne vraiment pourquoi, le hobbit se décide à suivre les nains, puis toujours aussi mystérieusement il décide de sauver leurs rois...Ce n'est pas un défaut d'acting : évoluant dans un style de rôle familier (le candide), Martin Freeman est impeccable et montre une grande précision de jeu. Mais ce personnage principal très sympathique, souvent drôle, peine à convaincre quand à son parcours initiatique.
En fait, le film nous ment : il aurait dû s'appeler « the king dwarf », tant le personnage le plus charismatique du film, au background le plus riche est ce prince des nains en quête d'un royaume. Après gollum évidemment, dont la présence est un pur régal de mise en scène et de jeu d'acteur.
S'il a toujours du mal avec ses scènes « solennelles », jackson semble avoir tout de même appris de ses erreurs depuis le seigneur des anneaux. A fondcombe, cette fois-ci les personnages ne s'échangent plus des dialogues murmurés, debout l'un en face de l'autre et raides comme des piquets. Certains sont assis, d'autres debout, on esquisse des petits gestes naturels...Ce n'est pas encore la panacée, mais il y a eu un net effort de mise en scène. Le jeu de hugo weaving en est une bonne illustration : beaucoup plus souple, il est du coup moins indigeste. Restent encore quelques mauvais plans où les personnages se tournent vers la caméra pour dire des choses importantes. Maladroits et sitcomiens, ils restent heureusement assez rares.
Ces défauts mis à part, le hobbit est un divertissement de haut, de très haut vol. Visuellement d'abord : les paysages naturels (mais le sont-ils vraiment?) sont d'une beauté renversante. Jackson laisse bien le temps au montage de nous faire profiter de ses décors fantastiques, ça marche très bien.
Dans les scènes d'action, la caméra virevolte avec virtuosité, quand il le faut. Jackson assoit pour de bon son statut du maître de la plongée/contreplongée : c'est vertigineux à souhait et physiquement très immersif. On note quand même un souci de spatialisation dans les poursuites en plein air : comment ces gros félins, à quelques bonds d'une bande de nains, se font distancer de plusieurs centaines de mètres dans le plan suivant, mystère !
Les effets spéciaux sont excellents...On a beau se dire qu'aujourd'hui tout est possible en sfx, on reste vraiment stupéfait du rendu de certaines scènes. Tout ce qui se passe chez les gobelins, c'est du pixar live! Le film lorgne d'ailleurs très clairement vers le film d'animation, notamment dans les poursuites : il y a un côté cartoon dans le spectaculaire qui pourra rebuter. Il faut être prêt à accepter beaucoup de choses énormes. La scène des trolls crétins et des poneys aurait sans doute mérité d'être écourtée, elle est un peu « hors ton » et semble sortie d'un disney. Le maquillage des nains pourra gêner, mais ils sont suffisamment bien écrits et mis en scène : on passe outre.
Howard shore reprend les thèmes principaux du seigneur des anneaux. Il introduit un peu de nouveauté pour mettre en musique les nains, mais globalement il recycle. Cela fonctionnera pour le nostalgique de la première trilogie, mais on aurait aimé un peu plus de personnalité.
Blockbuster de luxe, le hobbit est à conseiller à tous ceux qui veulent en prendre plein la vue. A ce niveau-là, le contrat est plus que rempli. On regrettera quand même l'écriture du personnage principal, cantonné à incarner un élément comique dont les évolutions peinent à convaincre.